Corse :superstitions et croyances .
En Corse, superstitions et croyances ont longtemps et profondement marqué la vie de tous les jours .
Beaucoup moins vivaces qu'hier, certaines traditions perdurent, surtout dans les villages. Ne dites pas à une mère que son bébé est joli, vous risqueriez de rendre jaloux les esprits du mal, qui s'empresseraient de se manifester ,par exemple, en provoquant une colique au nourrisson.
Incursions païennes en monde chrétien, de nombreuses pratiques (comme accrocher un œuf à un crucifix ou confectionner un gâteau des morts avec du broccio séché) sont tout de même liées au vendredi saint, au jeudi de l'Ascension, à la Toussaint, du lundi de Pâques. Le soir de Noël -lorsque les démons sont affaiblis, comme chacun sait- les femmes se transmettent les incantesimi (prières magiques) qui maîtriseront le mauvais sort. Au hit-parade des pratiques conjuratoires, la signatura figure en bonne place. Elle est effectuée par la signadora, qui décèle les envoûtements. Pour les casser, cette femme jette de l'huile dans une assiette remplie d'eau. Si les gouttes restent, il n'y a pas de danger. En revanche, si elles s'amassent, il y a un sortilège, que l'on rompt en coupant l'huile avec des ciseaux. Cette pratique est encore pratiquée de nos jours contre "l'"occhju" ,le mauvais oeil .
Parmi les figures qui peuplent ce monde ésotérique, les mazzeri sont des célébrités. Il s'agit de personnes qui, en rêve, voient les décès à venir. Deux fois par an, les mazzeri de chaque village s'affrontent oniriquement sur un col à coups d'asphodèle (ou de tibia !). Le gagnant aura le moins de morts à déplorer l'année suivante. Jean-Claude Rogliano, écrivain, fils de conteur, intarissable sur le sujet, leur voue une véritable passion: « L'important n'est pas d'y croire, mais d'en comprendre la charge symbolique. Vivants parmi les morts, ils sont signe d'espoir.
Et il est crucial que les traditions demeurent, car elles sont la marque de notre culture. Nous n'avons pas rejoint le marécage des peuples sans mémoire...»